Mariage Gascon (Jakethesaint/Sehanne)

Une ombre attentive a surgi du néant et enlacé ses doigts brûlés par trois longues semaines de chevauchée. Dieu qu’il lui a manqué ! Toujours le même, toujours un autre… elle le devine avant de le reconnaître. Leurs regards se confondent et le monde autour d’eux s’efface. Jamais tout à fait sienne mais jamais à un autre, ils s’appartiennent sans serments tapageurs ni fausses promesses. Forts d’un avenir jamais acquis.

Leurs mains s’étreignent. Elle le veut, elle l’aura. Là, maintenant. A l’aveuglette elle sort du rang, entraînant dans son sillage le vaincu consentant. D’un œil sûr et aiguisé elle inspecte les chapelles délaissées, contourne une pile monumentale et frôle une tenture de velours cramoisie. Derrière, une porte. Elle s’y glisse sans lâcher son homme qui n’offre aucune résistance. Un escalier étroit descend en colimaçon, elle devine, sous la nef pleine d’invités, les gisants reposant sous les voûtes ogivales. La crypte. Peu de chance qu’on les surprenne ici bas. Peu de chance que les témoins de granit ne trahissent leur présence.

L’endroit repose dans un silence plein d’un héroïsme décrépi mais triomphant qui la laisse de marbre. Lui par contre, la laisse de braise. A tâton dans la pénombre elle le plaque contre le mur glacial et entreprend de défaire l’officier de son uniforme arrachant dans sa fougue quelques boutons de cuivre. Elle a plaqué ses lèvres sur les siennes et le dévore avec gourmandise. Le régime sec imposé par son périple lui a ouvert l’appétit. Et il est féroce. Ses mains se faufilent sous la chemise de coton, effleurent les cicatrices à peine refermées, caresse le torse, sentent les muscles jouer sous la peau. Elle lui griffe le dos, lui mord le menton, l’épaule, s’arrête haletante pour contempler les traits saillants de son visage adoré. Des bruits indistincts leur parviennent, s’agirait de pas se faire enfermé dans l’édifice pour la nuit ! Serait-ce déjà l’Ite missa est ?

« Oui, Flex, je t’en prie, mais ne soyez pas en retard pour la fête. »
- Il en sera ainsi messire Jake ! Un grand sourire pour le remercier.

Non d'un cul d'none j'en ai le coeur tout chamboulé ! En se retournant, il dit un de ces jurons, jurons qu'il jurait trop de temps cette dernière semaine. Rien à en faire, il était digne de son nom.
Ela discutait avec Bastien, son petit frère. Flex lui n'avait pas encore eu l'occasion de croiser le petit bonhomme, il pensait que c'était un gamin parmi tant d'autre.
Le temps de s'avancer, il affichait un grand sourire en regardant Ela. Le jeune Auxonne devait se trahir rien qu'à lui-même : bien qu'il résista, son visage devenait rouge pimenté - couleur en passant préférée du visage de Finute.
Sa y est il avait fait les quelques pas pour la rejoindre. En temps normal, il l'aurait prise par les hanches et soulever dans les airs pour lui dire bonjour, mais ce jour d'hui sera différent.

Ahem, son pied gauche recula de quelques centimètres, et son genoux vint se poser au sol. Son bras gauche tombait par gravité près de lui, et sa main droite vint chercher celle d' Ela. Sa tête se dirigeait vers celle d' Ela, et ses yeux restaient figés à son regard. Au début, il souffla du nez, exprimant quasiment un rire pour ce qu'il faisait. Il se reprit, et annonca :
Moi, Enguerrand Louis-Perceval, dit Flex, d' Auxonne, fils du Duc de Bourgogne Vaxilart & Baron d' Auxonne, et de Dublith, fils de la sainte Geneviève ; beau-fils du Volverine, vassal du Wulfen, père de son Altesse Armoria, et du très grand Vortiris, histoire de prouver qu'il avait bien ses moyens, et que c'était lui et uniquement lui qui lui demandait, vous demande, Ela, de Diesbach et de Belleroche, dit Finute, la merveilleuse, hop,un petit mot doux en passant, de me prendre en ce jour d'hui, pour fiancé légitime, et ce devant vos parents & Aristote commes témoins.
Paf ! C'est qu'il avait la classe tout de même là au beau milieu de la cathédrale de Bordeaux. Peu d'homme pouvait se vanter d'avoir ce culot là. Flex avait prévenu Ela : à force que celle-ci le chamaille sans arrêt et ne lui laisse la paix il le ferait. Et il venait de le faire. La demander en fiançailles, comme ça, sans même la prévenir, ho que non elle ne devait pas du tout y penser. Tant mieux, la surprise était certainement réussite..

Quelques moments passés avec le petit Bastien lui avait encore fait un bien fou, ce petit était incroyable et elle espérait pouvoir l’entendre jouer de la fameuse flûte.
Ela se releva lorsque Bastien partit à travers la foule. Elle le regarda pendant un moment partir. Elle avait un petit frère, ses parents adoptifs venaient de se marier, l’homme qu’elle appréciait tant était présent… que pouvait-elle attendre de mieux ?
Le sourire aux lèvres, elle se retourna, Enguerrand arrivait vers elle, un sourire radieux aux lèvres et… il était rouge.
Il n’aurait pas bu quand même… non, impossible, il était bien lors de son passage dans l’allée centrale à la suite de la mariée. Non non, il y avait quelque chose d’autre… Peut être le fait qu’il faisait un peu chaud… quoique, il ne faisait pas si chaud que cela en ce mois de Novembre…

Sourire amusé aux lèvres en le voyant arriver près d’elle. Elle allait commencer à discuter avec lui lorsqu’il réalisa un mouvement qui intrigua la jeune femme qui le regarda interrogative. Elle comprenait tout de même se geste lorsqu’il posa son genoux à terre et lui prit sa main, la regardant dans les yeux. Elle ne le quittait pas de son regard.

« Moi, Enguerrand Louis-Perceval, dit Flex, d' Auxonne, fils du Duc de Bourgogne Vaxilart & Baron d' Auxonne, et de Dublith, fils de la sainte Geneviève ; beau-fils du Volverine, vassal du Wulfen, père de son Altesse Armoria, et du très grand Vortiris, vous demande, Ela, de Diesbach et de Belleroche, dit Finute, la merveilleuse, de me prendre en ce jour d'hui, pour fiancé légitime, et ce devant vos parents & Aristote commes témoins. »

Son sang ne fit qu’un tour, sa respiration s’accéléra. Son teint clair passa au rouge piment, -ce qui devenait une habitude- ses yeux ne le quittait pas. Elle ne s’attendait pas à cela… vraiment pas. L’émotion du mariage et maintenant cette demande de fiançailles… elle porta son revers de main droite à son front, fermant ses yeux, comme si elle allait s’évanouir. Mais il n’était pas faux qu’il lui faudrait surement des sels pour l’aider… Ela se raccrocha au banc évitant ainsi tout risque… quoique…
Elle en avait eu le souffle coupé, mais d’une voix chevrotante, rouvrant les yeux et le regardant lui répondit de façon la plus adéquate :

Moi… Ela de Diesbach de Belleroche, dit Finute, fille adoptive de Jake de Valombre et Sehanne de Valombre accepte de vous prendre, Enguerrand Louis-Perceval, dit Flex d'Auxonne et de Dublith… en ce jour de 12 Novembre 1456 pour, elle repris son souffle, sa voix chevrotant toujours, pour fiancé légitime.

Son coeur venait de faire un bond dans sa poitrine, elle le regarda, les yeux légèrement embuhés d'eau, un heureux sourire aux lèvres...

- ... chier !
Un dernier baiser, un dernier brasier.
- Reboutonnes-toi l'éventré, mets de l'ordre dans te viscères ! l'enjoint-elle tout en relaçant son propre corsage chamarré. Enfin celles qu'il te reste ! la messe est dite. Faut qu'on prenne la file de l'air avant de se retrouver enfermés ici jusqu'aux matines ! De toute façon c'est aussi bien. Probable qu'on aurait fini par réveiller les morts...

Elle est proprement rhabillée bien avant lui. Ah ces hommes ! Fins bretteurs et beaux parleurs mais incapable d'enfiler correctement un bouton. En souriant elle écarte d'un geste tendre les doigts du maladroit et entreprend de réajuster l'uniforme qu'elle lui arrachait tantôt. Amusant ce que ces gestes d'une incroyable banalité lui paraissent soudain relever d'une inquiétante intimité. C'est la première fois qu'elle s'y adonne, ayant toujours préféré fuir les lieux de leurs ébats avant le chant du coq.

Souriante elle enlève d'un revers main une poussière invisible sur son épaule et l'entraîne à nouveau à sa suite, cette fois vers la surface. La lumière pourtant fort tamisée de la nef l'éblouit quelques secondes. Son regard cherche les visages amis... sans doute ont-ils déjà quitté les lieux. Près de l'autel les mariés et leurs familles reçoivent les dernières félicitations d'usage. Que faire ? Elle congratulerait volontiers Jake et Sehanne tant le monde lui semble idyllique depuis quelques heures... Néanmoins ils ont sûrement déjà leur compte d'émotion pour la journée ! Pas sûr que l'apparition soudaine et inattendue d'une ancienne maîtresse soit très appréciée. Surtout lorsque celle-ci n'a pas été conviée...

- Qu'est-ce qu'on fait ?... interroge-t-elle son géant éventré.

Elle a dit oui. Oui, oui, elle l'a dit ! Foutaise les gens d'autour, il n'y avait plus qu'eu deux. L'un agenouillé, l'autre debout. La dernière avait du mal à parler, il est vrai que cette surprise, était une surprise très réussite.
C'est dans ces moments là, inattendus, qu'il faut demander fiançailles, ou épousailles.

Mais ce qui est la cerise du gâteau, c'est que c'est celui qui demande qui, en met plein les yeux à l'autre au début. Puis le moment où vous terminer que vous la souhaiter la prendre pour fiancée, la situation s'inverse : vous vous accroché à ses lèvres, s'agripper à son visage et son regard.
C'est exactement ce qu'il faisait, le jeune homme. Ela avait un peu de mal à se tenir droite, c'était amusant. Non pas amusant dans ce sens là, c'était de voir sa réaction.

C'était peut être la première fois qu'ils se parlaient ainsi. Ils ne s'étaient jamais embrassés, bien qu'ayant dormi ensemble, ils n'avaient rien fait, si ce n'est dormir entrelacer l'un à l'autre.

Bordel de crémandieu qu'il était heureux là.. Une fiancée. C'est sur que c'était une phase avant de passer la corde au cou, mais peux le chaux, le bonheur avec elle.

Mouarf, ma douce Ela, qu'il dit, ému. Sans même laisser le temps à Finute de se remettre, le jeune Auxonne se releva. Il posa délicatement ses mains sur les hanches de sa fiancé désormais. Et, pour la première fois, attendant ce moment avec impatience, il décida de l'embrasser..
Un baiser des plus fougueux, quelque chose qui attendait depuis longtemps. Flex lui croquait ses lèvres sucrées, il était sous son charme.. L'on ressentait cette intensité dans ses gestes, cette envie qu'il avait pour sa fiancé.
Fiancés, il s'engageait à se tenir droit et courtois avec elle maintenant. C'était un devoir moral par dessous tout, comme l'on lui avait enseigné..
Ela n'avait pas de soucis à se faire avec lui : bien qu'il ronchonne aigrement, c'est un vrai coeur d'artichaut ..

L’Abbesse semblait rêvasser, alors que deux témoins se dirigeaient déjà vers la sortie. Jake fut un surpris, alors qu’il fallait se réunir afin de former le cortège pour la sortie de la cathédrale. Il toussota et haussa le ton, voix qui résonne, pour avoir l’attention des invités.

« Votre attention svp ! Ne quittez pas la cathédrale de suite. Formons le cortège. Ensuite, nous vous invitons tous pour la fête en notre nouvelle demeure Le Castel des Roses Bleues. »

Voilà, c’était dit. Un peu mal à l’aise mais il ne voulait pas que tout le monde s’en aille. Il regarda sa tendre épouse, heureux.

« Madame de Valombre … ma tendre épouse, si vous voulez bien prendre mon bras ? » lui dit-il d’une voix tendre avec un clin d’œil complice.

La marche nuptiale jouée par les Orgues retentit dans la cathédrale.

Les mariés se placèrent à la tête du cortège, le petit Bastien devant eux. Derrière suivaient leur fille Finute et son fiancé, accompagné de la famille Kay Azzera et Solange, les témoins Valérianne, Artemix et Godgaby, avec les garçons d’honneur Estalabou et Namaycush, ses filleuls Darkrystal et Silver, enfin les proches, amis et invités.

Ils se dirigèrent tous vers la sortie, où la lumière du soleil les éblouit un instant. Sehanne et Jake menait tout ce beau monde, le visage rayonnant de bonheur.

Arrivés sur le parvis, les mariés étaient entourés par tous leurs amis qui les félicitaient de leur union.

Debout, ne sachant quoi penser, tout allait vite, si vite... Heureuse, oui, oh que oui elle l'était, elle était sous son charme...
Le regardant comme elle le pouvait dû à ses larmes de joie, laissant sa main appuyée sur un banc, l'autre dans celle de Flex....
Un clignement des yeux et le voilà qui s'était redressé et qui la tenait par les hanches.
Ela ramena ses mains au niveau du visage d'Enguerrand qui, ce dernier vint l'embrasser fougueusement. Son premier baiser avec lui depuis qu'ils se connaissaient, un baiser qui avait l'air tant attendu. Le sentir, l'embrasser... elle tenait fermement à lui.

A la fin de ce baiser, un sourire heureux se redessina sur les lèvres de la jeune femme, les yeux fermés, un dernier baiser volé avant de lui murmurer un : Je vous aimes...
Elle rouvrit les yeux, le regarda et l'enlaça. Elle était heureuse, plus qu'heureuse même. Elle était fiancé à cet homme, à ce bel homme...

Jake parla, ce qui la fit sortir de ses pensées. Oui, il fallait y aller, ils n'allaient pas s'éterniser ici... même si elle se sentait bien en cette sainte bâtisse.
Ela déposa un tendre baiser sur le bord des lèvres de Flex avant de passer son bras autour du sien et de lui dire :

Allons-y, on risque de nous attendre sinon.

Sourire et marche...